Avez-vous besoin d'un conseiller en art (Art Advisor)?

 

Jusqu’à une époque récente, le conseiller en art assumait surtout le rôle de curateur de collections importantes, généralement au sein d’entreprises ou organisations d'envergures.   Ce rôle est encore très présent comme en fait foi le nombre d’individus dont l’identification dans le bottin de l'Association of Professional Art Advisors les lie au monde des grandes corporations publiques ou privées de ce monde.

Puis, petit à petit, d’autres entreprises, ne pouvant se payer un curateur permanent, ont alloué des mandats souvent ad hoc à des personnes pour les aider à gérer leur expansion dans le monde des arts.

La poussée plus récente des conseillers en art auprès des collectionneurs privés date des années ’80 et ne semble pas sur le point de s’épuiser si l’on se fie au nombre d’individus et entreprises qui s’identifient comme "Conseiller en arts" (Art advisor) sur Internet.   Même les banques se sont intéressées à ce marché sous le couvert de la gestion de fortune de leurs clients aisés.

Ceci a un impact certain sur les autres joueurs dans le marché.

Traditionnellement, le mentor du collectionneur était le galeriste.  Tous les collectionneurs vous le diront : le galeriste a été leur maître.  Aux États-Unis, Léo Castelli, dans une période encore récente, a incarné cette vision.

Depuis lors, le galeriste et le modèle Castelli auquel il s’identifiait, sont assaillis de toutes parts.

  • Les maisons d’enchères sont de plus en plus présentes en art contemporain, un créneau qui, jusqu’à tout dernièrement, était réservé aux galeries.
  • Avec l’explosion du marché et la venue de nouveaux « collectionneurs » souvent relativement fortunés mais peu connaissants, les conseillers en art s’imposent en intermédiaire auprès de ces clientèles qui peuvent se les payer.   Comme le souligne Thompson1, ils gèrent d'abord "l’insécurité de leurs clients".
  • Les intermédiaires virtuels (galeries, maison d'enchères, etc.) prennent doucement leur place auprès des clientèles restantes.

Le conseiller en art s’est imposé entre le galeriste et le collectionneur fortuné débutant.   Ceci crée un filtre relativement dispendieux entre le galeriste et le collectionneur et est susceptible de créer des conflits d'intérêts à la limite de l'acceptable.   Ce qui ne fait pas l’affaire de tous.

Seules les « branded » galeries, les galeries de haut niveau qui ont réussi à se créer une signature distinctive, à faire d'elles-mêmes une marque, réussissent à éviter d'être touchées par le phénomène.   Le lien privilégié que ces galeries entretiennent avec leurs clients exclut presque à priori la présence de conseillers en arts.   Chez les majors, on « place » une œuvre chez un collectionneur à qui on octroie le privilège d’être reconnu comme client.   Le lien est organique et très rébarbatif à la présence de "corps étrangers".

En pratique, le modèle de distribution/diffusion se calque à la pyramide des revenus décrite par Piketty2.   Les très riches3 se retrouvent chez les majors, les « branded » galeries;  les fortunes récentes mais avec des connaissances limitées en art utilisent les consultants en arts afin de les guider dans ce monde étrange et les moins fortunés achètent sur Internet.  

Et entretemps, on assiste à la lente disparition du collectionneur appartenant à ce que l'on appelait autrefois la "classe moyenne" et, malheureusement aussi, des galeries qu'il soutenait.

Avez-vous besoin d'un conseiller en art (Art Advisor)?  À vous de décider.

Quelques articles intéressants sur le sujet.

o    Grant, Daniel.   When Art Buyers Need Help (The Wall Street Journal, Feb. 1, 2015)

o    Ferro, Shane.  The Ascent of the Art Advisor: Five things to Know about the Growing Taste-for-hire Industry  (Blouin Art Info, August o2. 2011)

o    Milburn, Robert.  Art Advisors: Are They Worth It? (Barrons, Nov. 8, 2014)

o    Adam, Georgina.  Hidden Persuaders: A look at the (very private) world of the top art advisers.   (Financial Times, August 4, 2011)

o    Markell, Catheryn.  Should You Work with an Art Consultant (December 2, 2015)

o    Pogrebin, Robin and Graham Bowley.  Soaring Art Market Attracts a New Breed of Advisers for Collectors.   (The New York Times, August 22, 2015.)

o    Abrams, Amah-Rose.  Frieze Masters Introduces Art Advisory Service to ‘Demystify’ the Market for New Collectors.   (Artnet News, July 4, 2016.)

o    Neuendorf, Henri.  Art Demystified: What Is The Role of Art Advisors?.   (Artnet News, August 11, 2016.)

o    Woodham, Doug.  The Secret Brokers of High-End Art Deals.   (Artsy, January 18, 2018.)

o    Anonymous.  Demystifying the Art Advisor.   (Artwork Archive, July 24, 2018.)

o    Sussman, Anna Louie.  What You Should Expect from an Art Advisor.   (Artsy, January 15, 2019.)

o    Custodio, Mariana.  Do art collectors actually need curators?   (June 27, 2020.)

Et si vous choisissez d’aller de l’avant, quelques facteurs à considérer dans le choix d’un conseiller en arts.

o    7 Things to Look for When Hiring an Art Consultant.   (The Clarion List, September 05, 2019.)

Voir notre page "Les individus et organisations offrant des services-conseils en arts visuels (Art Advisors)" afin d'identifier les conseillers en art disponibles près de chez vous.

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1  Thompson, Donald N. The $12 Million Stuffed Shark: The Curious Economics of Contemporary Art. New York, NY: Palgrave Macmillan, 2008.   p. 9.

2  Piketty, Thomas.   Le capital au XXIe siècle.    Paris, Le Seuil, 2013. 

3 "The art market suggests just how powerful economic inequality can be. Many elite artists depend on a tiny fraction of the 1%".  in Fine, Gary Alan.   "The threads of Practice".   Society, March 2015. p. 1.